Notre rencontre avec François Bourgeais s’est déroulée dans le magnifique décor du Stade de soccer de Montréal, situé à deux pas du Collège Ahuntsic, où s’entraînaient cet après-midi-là de jeunes athlètes sous les yeux attentifs de leur coach.
Q : Entraîneur Bourgeais, racontez-nous vos origines.
R : Je suis né en 1973 à Évreux en France et j’ai grandi à Angers. J’ai obtenu un baccalauréat en Comptabilité-gestion à 17 ans, un Bac+2 en Commerce à 19 ans, puis à 30 ans, j’ai obtenu un diplôme universitaire de gestion des organisations sportives de l’Université de Lyon 1.
Côté foot, j’ai joué à l’académie du FCNantes de 14 à 19 ans, j’ai été joueur professionnel à Angers SCO de 21 à 29 ans, puis entraîneur, responsable de la préformation du FCNantes de 2005 à 2011. J’ai 46 ans, j’ai deux enfants (19 et 15 ans) et je vis au Québec depuis 2012.
Q : Qu’est-ce qui vous a conduit à faire carrière en tant qu’entraîneur ?
R : Avant de devenir entraîneur, j’étais tout d’abord joueur. Vers l’âge de 5-6 ans, j’ai voulu imiter mon grand frère qui jouait au foot (soccer). J’ai commencé à jouer en club à l’âge de 7 ans à La Vaillante Sport Angers.
À 14 ans, j’ai été recruté par le Football Club de Nantes (FCN), club professionnel reconnu pour la qualité de son centre de formation. J’ai été entraîné dans cette Académie par de très grands entraîneurs pendant cinq merveilleuses saisons (Denoueix, Bauduin, Albert, Suaudeau). Ce sont ces personnes qui m’ont donné le goût d’apprendre puis celui de transmettre.
Plus tard, en parallèle à ma carrière de joueur professionnel, j’ai passé mes diplômes d’éducateur avec succès. Je suis titulaire d’une licence A UEFA (diplôme reconnu au niveau international). Depuis, entraîner me passionne. Former de futurs joueurs « pro » comme de futurs adultes est devenu une vocation.
Q : Vous avez entraîné des personnalités connues du monde du soccer. Qui sont ces athlètes?
R : En six saisons en tant que responsable de la préformation au Football Club de Nantes (U14-15), j’ai eu l’occasion d’entraîner quasi quotidiennement une centaine de joueurs. Une quinzaine d’entre eux sont devenus joueurs professionnels à l’âge de 19-20 ans. Les plus connus jouent aujourd’hui au plus haut niveau:
- Léo Dubois (Lyon, équipe de France) ;
- Jordan Veretout (AS Roma, Italie) ;
- Valentin Rongier (Marseille, France) ;
- Abdoulaye Touré (Nantes, France) ;
- Koffi Djidji (Torino, Italie) ;
- Adrien Trébel (Anderlecht, Belgique) ;
- Moukhtar Diakhaby (Valence, Espagne).
Depuis mon arrivée au Québec, j’ai entraîné de nombreux joueurs (Longueuil, CNHP, Saint-Hubert, Collège Ahuntsic). Et, tout récemment, certains jeunes joueurs sont partis dans des organisations professionnelles. Les fruits commencent à murir et ce n’est qu’un début !
- Aboubacar Sissoko, que j’ai eu le plaisir d’entraîner depuis 2013, diplômé de l’Université de Montréal, et qui vient de signer un contrat professionnel avec les Wanderers d’Halifax (Canadian Premier League) et part à l’essai avec les Whitecaps de Vancouver (MLS) ;
- Mamadi Camara, que j’ai aussi entraîné de 2012 à 2014 à Longueuil puis à Saint-Hubert en 2019, diplômé de l’Université Simon Fraiser de Vancouver, et qui vient de signer un contrat professionnel avec le Colorado Spring Switchbacks (United States League) ;
- Charles Auguste (ancien élève athlète du Collège Ahuntsic et du CS Saint-Hubert de 2017 à 2019) a intégré l’Université de Creighton du Nebraska avec en poche une bourse d’études.
Je suis très heureux pour eux. D’autres joueurs vont suivre le même chemin de la réussite.
Q : Quels sont les principaux enjeux ou défis rencontrés en tant qu’entraîneur de l’équipe de soccer au Collège Ahuntsic?
R : Les enjeux sont multiples. Chaque année, largement aidé du responsable des sports, je dois :
- recruter les meilleurs joueurs du Grand Montréal malgré une concurrence féroce ;
- présenter un projet global qui intègre la performance scolaire autant que sportive ;
- établir un fonctionnement de qualité avec un encadrement sportif et médical de haut niveau ;
- gérer la charge d’entraînement pour que la progression sportive soit la plus efficace possible ;
- assurer le suivi des résultats scolaires ;
- promouvoir nos joueurs afin qu’ils aient la possibilité d’avoir de multiples options après leur passage au collège.
Tout cela est hyper enrichissant, mais cela demande beaucoup de communication, d’anticipation.
Q : En tant qu’entraîneur, quelles sont vos principales satisfactions au quotidien?
R : Au quotidien, il s’agit d’accompagner mes joueurs dans leur projet de réussite, leur réussite étant également la nôtre. C’est mon métier. C’est ce qui m’intéresse.
Nous avons remporté les championnats de la saison régulière 2019 et 2018 en restant invaincus. Ce qui a valu au Collège Ahuntsic d’être reconnu 1er au classement canadien ACSC en octobre dernier. Nous avons remporté le Championnat provincial en 2018 et 2017. Ces mêmes années, nous avons terminé respectivement en 8e puis 2e positions au Championnat canadien, en affichant une moyenne d’âge de 18 ans, bien plus jeune que nos adversaires des autres provinces, la preuve d’une qualité certaine.
Q : Quelles sont les qualités les plus recherchées chez un joueur comme chez un entraîneur?
R : Je recherche des personnes qui ont l’envie d’apprendre, le désir de progresser. Chez un joueur comme chez un entraîneur, je tente de détecter le potentiel de l’individu afin de le projeter aux niveaux supérieurs dans un futur à moyen terme.
Au-delà des qualités purement techniques de joueur ou d’éducateur, j’apprécie les individus intelligents, qui sont dans l’adaptation et dans l’anticipation. Les passionnés aiment passer du temps à constamment chercher à faire mieux. Posséder des qualités de compétiteur est évidemment un critère incontournable.
Q : En terminant, pourriez-vous nous révéler une tactique secrète et qui vous permet d’aider vos jeunes athlètes à atteindre l’objectif fixé?
R : Je n’ai pas de tactique secrète (et si j’en avais une, je n’en parlerai pas !). Seuls l’écoute, l’observation et l’entraînement sont les meilleurs moyens de comprendre ce que l’entraîneur explique ou démontre. Dès que le joueur a intégré ceci, c’est à lui de répéter et de s’adapter en fonction des situations de jeux qui se présentent à lui. « Jouer juste » est ce qui est le plus difficile à réaliser. Mais quel bonheur intérieur lorsqu’un éducateur voit ses joueurs réussir à comprendre ce qu’il a tenté de leur donner!